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Mai-Ndombe : À la Rencontre de Mathieu Bolaa dit « De la Forêt ».

D'un point de vue sociétal, Wildlife Works a travaillé avec les communautés locales pour construire des écoles, des hôpitaux et des puits d'eau potable, entre autres réalisations. C’est au niveau de l’écosystème que Wildlife Works a marqué la province du Mai Ndombe, voire le monde entier. Wildlife Works a donné au monde ce que personne ne pensait possible : la restauration d'espèces disparues depuis longtemps de la zone du projet, telles que les éléphants de forêt et les bonobos. L'architecte de ce projet grandiose n'est autre que Mathieu Bolaa, dit « De la Forêt ».

Mathieu Bolaa « De la Forêt » est diplômé en Sciences Biologiques, option Ecologie de l'Université de Kinshasa. Avant de rejoindre Wildlife Works, De la Forêt a travaillé pendant deux ans à l'African Wildlife Foundation, AWF, où il a dirigé le service d'habituation des Bonobos à la présence humaine et le suivi écologique des grands mammifères dans la réserve d’Iyondji et Lomako entre 2010 et 2012.

C'est en février 2012 que Mathieu Bolaa rejoint Wildlife Works en tant que Chef de service Biodiversité, et devient responsable du suivi écologique des grands mammifères et des activités humaines dans le projet REDD+ Mai Ndombe. Malgré son emploi du temps chargé, nous avons réussi à le rencontrer pour une interview qui a révélé de nombreux aperçus du travail essentiel que lui et son équipe accomplissent.


Mathieu Bolaa : Ma performance dans le Mai Ndombe est auto-gratifiante. Hormis la restauration de la faune (primates et pachydermes) vous remarquerez que les populations d'animaux captées en vidéo par nos pièges photographiques représentent généralement une population jeune. Cela démontre que la reproduction est efficace, puisque les animaux se reproduisent uniquement dans un environnement qui leur est sécuritaire.

Vous remarquerez également que contrairement au passé où les images d’animaux captées par nos pièges photographiques étaient nocturnes, les images diurnes sont devenues la norme. Cela prouve suffisamment qu’ils sont désormais à l’aise dans la zone de notre projet. Ils ne craignent plus les braconniers qui les obligeaient à vivre cachés. Plus d'une fois, la faune sauvage, en particulier les éléphants, a envahi les villages pour se nourrir de fruits et de légumes avant de retourner dans la forêt.

Ils ne présentent aucun danger pour les humains. L'agressivité chez les animaux se développe lorsqu'ils se sentent menacés par les humains. Ce n’est pas le cas dans le Mai Ndombe. On note néanmoins quelques cas d'invasion de champs agricoles. Wildlife Works verse une indemnisation après évaluation des dommages.

Wildlife Works : En 2022, nous avons vu une des images de piège photographique montrant la queue d'un léopard. Avez-vous capturé d'autres preuves de la présence de léopards dans la zone du projet ?

Mathieu Bolaa : Concernant l'image de la queue, nous n'avons toujours pas réussi à capturer une image complète. Néanmoins, nous pouvons vous assurer qu'une population de léopards (Panthera pardus) existe au sein de notre concession, bien que réduite. À plusieurs reprises, j'ai personnellement collecté des signes indiquant la présence de félins tels que des crottes, des empreintes de pas et d'autres signes. Gardez également à l’esprit que les léopards sont des animaux très discrets.

Wildlife Works : Parlez-nous de la restauration des éléphants dans la concession.

Mathieu Bolaa : En 2013, nous avons observé les premiers signes d'éléphants, certes anciens, dans la forêt près de Ngeleku dans la strate FORESCOM. C'est après consultation des communautés locales et pas sans difficultés que nous avons appris la présence d'éléphants à proximité des villages Panza I et Panza II dans le territoire de Kutu en dehors de la zone de notre projet. Dans cette zone, nous avions trouvé des signes plus récents de pachydermes. Nous avons compris que les travaux de restauration des éléphants dans la concession seront difficiles. Les éléphants avaient déserté notre concession à cause du braconnage. Nous espérions rendre la concession hospitalière pour leur retour.

WW : Parlez-nous de la première vue des éléphants dans l’enceinte.

Mathieu Bolaa : C'était émouvant. J'ai pleuré de joie lorsque j'ai vu les 3 premières images nocturnes d'éléphants dans notre enceinte. Il a fallu 5 ans de travail acharné pour arriver à ce résultat. Les premiers éléphants capturés par nos pièges photographiques ont été aperçus dans la forêt d'Ilé, au sud-ouest de notre concession. Cet événement a mis fin aux spéculations et critiques qui qualifiaient nos expéditions de randonnées touristiques.

Wildlife Works : Quelles sont les plus grandes difficultés rencontrées ?

Mathieu Bolaa : Au-delà de la science, il y a un aspect culturel et mystique qu'il faut ajouter à la biodiversité pour réussir. Pour la plupart, les gardiens culturels ou les chefs de village ont refusé de nous donner la position des éléphants. Selon eux, ce serait une trahison que de divulguer où se trouvent des animaux totems. Il a fallu beaucoup de persuasion pour les convaincre.

Wildlife Works : Il y a eu des rencontres insolites ?

Mathieu Bolaa : Nous en avons rencontré bien sûr. Parfois, nous trouvions des traces d'éléphants marchant dans la direction de nos pièges photographiques, puis changeant soudainement de direction et d'autres manifestations dépassant l'entendement humain. Les animaux pouvaient se tenir devant les caméras sans être filmés. Ce n'est qu'après négociations avec les chefs coutumiers que nous avons réussi à obtenir les images. Parce que la surveillance de la biodiversité n’est pas seulement une science, l’intégration communautaire est très importante. Je tiens tout de même à souligner que nous ne nous concentrons pas uniquement sur les inventaires de grands mammifères. Nous nous intéressons aux oiseaux et à d'autres espèces. Nous avons des images de Calao, d'Aigle doré, de Civette, etc.

WW : Quelles sont vos perspectives ?

Mathieu Bolaa : Je peux affirmer que nous n'avons pas exploité d'autres aspects de la biodiversité comme l'écotourisme. Nous devons d’abord nouer des partenariats avec des institutions de grande renommée dans le monde pour approfondir les connaissances sur les bonobos, les éléphants et d’autres espèces. Nous sommes une entreprise commerciale. Nous devrions investir dans la formation pour générer plus de capital.

WW : Quelles sont vos ambitions pour les années à venir ? Mathieu Bolaa : Je souhaite laisser un riche héritage à la jeunesse pour assurer la continuité du travail accompli. J'aimerais également gravir les échelons au sein de l'entreprise.


Par Jerry Nguwa, responsable de la communication en RDC

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